L’autosuffisance est-elle un mythe ?

autosuffisance cueillette framboises

Cet été, j’ai eu l’occasion de voir une amie qui s’est lancée dans un grand projet avec sa petite famille. Avec son mari, ils viennent d’acheter une maison avec un grand terrain à la campagne, dans le but de faire leur potager en permaculture et de vivre le plus possible en autosuffisance.

D’un quotidien engagé à l’autosuffisance

Mon amie est une personne très engagée qui réfléchit depuis de nombreuses années à sa manière de consommer et à son impact. Elle et son mari ont déjà modifié leurs habitudes en profondeur dans leur quotidien. Et aujourd’hui, ils ont envie d’aller encore plus loin en produisant la majorité de leur alimentation. Ils souhaitent tenter de vivre en autosuffisance, le plus possible en dehors du système, par le biais du troc, du don, de l’échange de services, de compétences…

Nous en avons discuté car je trouve cette démarche très intéressante, mais au final, nous nous sommes rendues compte qu’on pouvait retourner le problème dans tous les sens, on en arrive toujours aux mêmes conclusions : non, on ne peut pas se passer totalement d’argent ! Et non, on ne peut pas vivre totalement en dehors du système.

La notion de propriété, frein à l’autosuffisance ?

La raison principale, c’est que notre société est basée sur la notion de propriété. Il nous faut un toit sur la tête, et ce toit, il appartient forcément à quelqu’un : soit on est propriétaire de notre lieu de vie, soit on est locataire et on donne de l’argent à notre propriétaire. Et même si on est hébergé, le logement appartient à quelqu’un. Chaque centimètre carré de sol appartenant à quelqu’un, même s’il nous prenait l’envie d’aller construire une cabane au fond des bois, eh bien ce bois… appartient à quelqu’un (c’est bien, vous suivez !). Alors, peut-on réellement tendre vers l’autosuffisance pleine et entière ?

Je me souviens de la sensation vertigineuse que j’ai ressentie lorsque j’ai eu cette fulgurance… Je dois bien avouer que dans les jours qui ont suivi cette prise de conscience, j’étais plongée dans des abîmes de mes pensées, à m’en faire des noeuds au cerveau… Et même complètement dépitée. Je me sentais pieds et poings liés à ce système que je déplore et contre lequel je me bats au quotidien depuis des années : le règne de la société de consommation et de l’argent.

Et puis… Petit à petit, mon côté pragmatique a refait surface. Lorsque je ressens une émotion violente par rapport à une situation, je me dis qu’il y a toujours 2 solutions :

  • Soit je peux modifier la situation, auquel cas j’agis.
  • Soit je ne peux pas modifier la situation, donc c’est sur mon état d’esprit qu’il faut que je travaille.

Dans le cas qui nous intéresse aujourd’hui, j’ai compris que je pouvais agir sur les 2 niveaux.

Comment modifier ma dépendance à l’argent ?

Je ne peux pas modifier entièrement le système moi toute seule avec mes petites mains. Même si je me roule par terre de colère. Même si je ferme les yeux, que je me concentre très fort et que je convoque toute ma pensée magique : non, quand je les ouvre de nouveau le revenu universel n’est toujours pas en place, l’égalité entre tous les êtres humains n’est toujours pas là non plus, et l’écologie n’est toujours pas une priorité. Bon. Mais par contre ce que je peux faire, c’est modifier ma propre dépendance à l’argent.

Pour influer sur cette dépendance, je peux réfléchir en profondeur à mes besoins et voir comment je peux les combler sans passer par la case argent, ou le moins possible :

Quelques pistes de réflexion…

J’ai besoin d’un toit, mais est-ce que j’ai besoin d’une si grande maison ?

J’ai besoin de travailler, mais est-ce que j’ai besoin de travailler ici, dans cette entreprise, pour faire ça ?

J’ai besoin de manger, mais est-ce que j’ai besoin d’autant de diversité, de faire entrée / plat / dessert à chaque repas, de grignotages ?

J’ai besoin de vêtements, mais faut-il que j’en aie 20 de chaque sorte, et tous neufs ?

J’ai besoin d’un objet, quelqu’un peut-il me le prêter, me louer, me le donner ?

J’ai besoin de loisirs, de me changer les idées… Mais est-ce que je suis obligé de partir en vacances à l’étranger pour ça ; d’enchaîner resto / ciné / activités (karting, thalasso, escape game, visites) tous les week-ends ?

Gardons en tête que l’argent n’est qu’un outil.

Donc, puisque nous ne pouvons pas nous en passer, pourquoi ne pas l’utiliser pour des actions qui vont dans le bon sens (acheter bio, local, éthique) ?

Finalement, j’en arrive à me dire que la plupart de nos besoins sont dictés par la norme. On fait comme tout le monde, métro boulot dodo loisirs, sans se poser pour réfléchir à ce qui nous porte vraiment, à nos réelles envies personnelles, à nos vrais besoins : assurer nos besoins vitaux, aimer et nous sentir aimés, nous accomplir.

Donc effectivement, pour le moment, nous n’avons pas le choix : qu’on le veuille ou non, nous ne pouvons pas quitter entièrement ce système pour vivre dans l’autosuffisance la plus parfaite. Mais nous avons quand-même une sacrée marge de manœuvre ! Ce dans notre vie quotidienne, nos rapports aux autres… Et surtout à nous-mêmes !

Marie Duboin, auteure du blog La Salade à Tout

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